observatoire des sondages

Sondages pousse-au-crime (I) : Rumeurs et coronavirus

lundi 17 février 2020

Les sondages sur tout et n’importe quoi existent depuis « toujours ». Leur immixtion dans l’espace public a longtemps concerné la vie politique et les élections. Ce temps semble définitivement révolu. Guerre, attentats, meurtres, viols, faits divers de toute sorte sont devenus en quelques années des ingrédients de base pour les fabricants d’études minutes.

Majoritairement des QCM sommaires remplis en quelques instants par des sondés payés, généralement en bons d’achat, et souvent de leur smartphone. Une formule entachée de tous les biais imaginables mais une aubaine pour la presse et les chaines d’infos sans fin qui les consomment en continu. Il n’a donc pas fallu attendre longtemps après les premiers signalements hors de Chine de personnes infectées par le SARS-CoV-2 pour voir des « enquêtes » sur ce virus apparaître. Leur « questionnement » demeure dans l’ensemble identique. Pour les exemples francophones celles d’Odoxa [1] et de Dart & Maru/Blue [2] en sont de bonnes illustrations. Trois questions types reviennent en permanence :

- Avez-vous peur ?
- Avez-vous changé ?
- Faites vous confiance au gouvernement ?

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Qu’une épidémie suscite peurs et fantasmes n’est à l’évidence pas une découverte, qui plus est lorsque presse et média s’en emparent. Matière première à sensations « stratégique » quand il faut ou que l’on veut parler tout le temps, donc invariablement finir rapidement pas ne rien dire. Difficile de comprendre autrement l’intérêt de ces questions de sens commun le plus ordinaire. Quant à la valeur des réponses, qu’elles rassurent ou non, plus encore sur des sujets sensibles et graves, elle est douteuse à souhait.

- Sans s’attarder sur l’incompétence plus que probable de la majorité des répondants en matière de santé publique on n’est guère surpris, qu’une partie des sondés d’Odoxa hostiles au gouvernement français, en profitent pour exprimer leur hostilité, le sujet importe peu.
- Auto-déclaration sans contrôle rien bien sûr ne permet de s’assurer de la sincérité des répondants, de distinguer (par exemple) ceux qui se flattent à bon compte d’une morale sans « tâche ». A l’inverse, impossible également de connaitre finement tout ceux que ces questions incitent à « avouer », car sans risque, des attitudes irrationnelles ou condamnables moralement voire pénalement.

Du bruit et de la rumeur.


[1France-Info, Le Figaro 30 janvier 2020.

[2Postmedia, Journal de Montréal, 4 février 2020.

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